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Full text of "Au pays des Dunes: excursions pittoresques aux anciennes granges ..."

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>J-iIh. 137?.? 



HARVARD 
COLLEGE 
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Excursions Pittoresques 

nux 

tlCIEn.NES (fRnNGnS^NUnEIIT/lLES 

' DE Ui 

Flhmdre maritime.. 

• /Ibbayes des Dunes et deTer Doest • 

• XIII* Siècls.- 

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WuLPEM . Fermes de 

LlSSEWEOHE. BoCflERDE, 

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♦ <► ♦ Hei«me,« » 

Ter Doest. * 

mec UN APERÇU historique phrV. Fris . 

MfllSOH D'ÉDmOMS D?lRT-N.HEINS;9,RUEDE BRBBfllIT. 



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ANCIENNES GRANGES MONUMENTALES DE 
LA FLANDRE MARITIME. 



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AU PAYS DES DUNES. 

EXCURSIONS PITTORESQUES 
AUX ANCIENNES GRANGES MONUMENTALES 

FLANDRE MARITIME. 

ABBAYES DES DUNES ET DE TER DOEST. 




ARMAND HEINS, 

AVEC UN APERÇU HISTOSIQOB 
VICTOR FRIS. 



GAND, 
Maison d'éditions d'art N. Heins. 



igop. 

fi, r;.e S'-Mloliel 
— G AN D — 



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f\)erm 137S.8 
J 




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INTRODUCTION. 



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^armi les curiosités monumentales les plus 
) typiques se trouvant en Belgique, on peut 
' signaler, dans la Flandre maritime, une 
série de fermes immenses ayant appartenu aux 
célèbres abbayes des Dunes et de Ter Doest, 
toutes deux établies dans la région côtière. 

Ces fermes, ou du moins leurs restes de bâti- 
ments anciens, et surtout les granges gigantes- 
ques qui s'y trouvent ou s'y trouvaient, se distin- 
guent complètement de nos autres monuments par 
leur aspect et par leur destination. 

Ces constructions monacales lorment une caté- 
gorie à part, très caractéristique. 

Rien n'est comparable à la spéciale beauté et 
à l'ampleur inusitée des pignons de ces granges 
trop peu connues. 

Les dimensions extraordinaires et les lignes 
simples et nobles qui les distinguent, leur grand 
âge aussi, car ces granges remontent au XIIP 
siècle, nous ont paru dignes d'être signalées et 
étudiées attentivement. 



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Nous avons cru pouvoir soumettre au public 
touriste de notre côte, cet essai de monogra- 
phie qui constitue le résultat de nos recherches. 

On a fait l'historique et la description détaillée 
de la plupart de nos églises, de nos hôtels de 
ville, de nos monuments civils et hospitaliers; on 
a fait remarquer la splendeur des uns, la richesse 
des autres. 

On a négligé de s'occuper de ces constructions 
en briques que nous allons examiner, si vastes 
et si hautes qu'elles pouvaient abriter sous leurs 
toits superbes, entre leurs larges murailles, les 
récoltes les plus exceptionnelles. 

Les biens agricoles possédés par les abbayes 
des Dunes et de Ter Doest, dans notre région 
dunière, nous le verrons plus loin, étaient 
extrêmement étendus et nombreux. 

Et d'autres centres monacaux exploitaient 
encore d'importants territoires sur cette même 
partie maritime de notre pays. 

Nous allons rechercher l'origine de ces granges 
d'une étonnante pureté de style, faire ressortir 
leurs vastes proportions, et voir en quoi elles 
peuvent être comparées à nos monuments les 
plus réputés. 

Au cours de nos investigations pour réunir 
les éléments de ces monographies succintes, nous 
avons dû constater que peu d'auteurs s'en sont 



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— 9 — 

occupés; sur ces granges il y a pénurie pres- 
que complète de renseignements. 

A part l'ouvrage : Lisseweghe, son église et son 
abbaye de Ter Doest, par Léopold Van HoUebeke 
(Bruges, typ. Edw. Gaillard, 1863), aucun travail 
un peu complet n'a été consacré aux monuments 
qui font l'objet de cette étude. 

Seul, cet auteur donne une monographie 
assez détaillée de la ferme et de la grange 
superbe de Ter Doest, et il en souligne les 
belles formes et les vastes dimensions. 

En guise de courte préface il commence son 
livre par ces mots : 

« La publication des monographies de nos 
édifices offre un intérêt incontestable pour la 
formation d'une histoire complète de l'art national. 
Les matériaux manquent encore pour un tel 
ouvrage. 

« Si tous ceux qui s'occupent d'archéologie 
voulaient éditer les documents qu'ils possèdent 
au sujet des monuments, et les appréciations 
dictées par leurs connaissances et leurs recher- 
ches, le goût des études artistiques n'en devien- 
drait que plus vivace et la popularisation de 
l'histoire monumentale en serait certes la bien- 
faisante conséquence. 

« Ce n'est que lorsque chaque édifice de 
quelque importance aura sa monographie, qu'on 



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arrivera à un. pareil résultat pour notre patrie, 
dont les plus modestes villages possèdent des 
trésors archéologiques aussi précieux, qu'inconnus. 
{Juillet 1864, Bruxelles) >. 

Les judicieuses réflexions et les bons avis de 
Van Hollebeke, son appel qui ne fut guère 
entendu, du moins pour le genre de monuments 
dont nous nous occupons en ce moment, nous 
frappèrent vivement. 

Avidement, nous avons essayé de découvrir 
les travaux que son livre voulait faire surgir; 
ils n'existent pas, ou bien nous sont restés 
inconnus. 

Ces vœux, émis il y a tant d'années, sont 
donc restés sans écho, probablement. 

Au surplus, s'ils ne sont pas les classiques 
célébrités qu'ont coutume de prôner les guides 
et les albums, on ne trouve rien ou presque 
rien sur certains monuments ou sites qui méri- 
teraient cependant d'être signalés à nos archéo- 
logues et aux touristes. 

Les granges de notre côte flamande sont ainsi 
de parfaits exemples de raretés presqu'inconnues. 

Les lignes que nous venons de citer, emprun- 
tées à un auteur qui avait surtout en vue 
l'histoire des couvents dont il s'occupa, nous 
encouragèrent à tenter de réunir quelques docu- 
ments sur le groupe d'imposantes bâtisses qui 



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les rappellent, dédaignées jusqu'à présent. 

Nous désirions, depuis longtemps déjà, entre- 
prendre ce travail. 

Il nous parait neuf, et d'un certain charme 
aussi ; celui d'exhumer quelques traces de la 
vie de no& ancêtres et du genre de travaux 
auxquels ils s'adonnaient. 

C'est dans des chroniques heureusement pu- 
bliées par la Société d'Émulation de Bruges, il 
y a de nombreuses années, que nous trouvâmes 
la plupart des notes de nature à établir quelques 
points saillants pour l'âge et l'histoire de ces 
granges si intéressantes. 

Nous devons à l'aide très obligeante de notre 
ami M' V. Fris, dont la science est bien connue, 
d'avoir pu étendre ces notes préliminaires. C'est 
grâce à lui que des renseignements très nombreux 
et absolument sûrs viennent rendre ce travail très 
complet au point de vue historique. 

Ce ne sera pas la partie la moins intéressante 
de cette étude. 

Les courtes monographies que j'ai constituées 
sont faites plutôt au point de vue pittoresque. 

L'étude complète, technique devrions-nousdire, 
des bâtisses en question, reste à faire. 

Souhaitons qu'elle tente un architecte ou un 
constructeur appréciant les curieux motifs à 
rencontrer au cours de ces levés si désirables. 



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Et cette autre monographie, définitive, devrait 
se faire sans retard, avant que disparaissent 
subitement et à jamais ces modèles achevés de 
l'art de bâtir chez nos ancêtres. 

On peut, malheureusement, toujours craindre 
pour eux quelque soudaine catastrophe : un incendie 
violent ou un ouragan. 

Les tempêtes sont parfois d'une exception- 
nelle intensité sur ces landes infinies; exposés 
aux vents terribles qui viennent de la mer, toute 
proche, les vieux murs se désagrègent progres- 
sivement, fatalement... 

Leur ruine totale serait très regrettable; ces 
pignons imposants et superbes témoignent de 
l'éveil de la civilisation dans une contrée qui 
devait être morne et inhospitalière, aux âges 
anciens. 

1905. A. Heins. 



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APERÇU HISTORIQUE. 



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Secau de l'abbaye de Ter Doest ou de Thosan (Lisseneghe). 



au haut moyen-âge, la côte des Flandres 
1 ne présentait pas cette ligne régulière et 
I unie qu'elle offre de nos jours ; le rivage 
et la mer ne se côtoyaient pas sans se péné- 
trer; des baies étroites, parfois profondes, décou- 
paient notre frontière du nord. 

Une longue accalmie, durant laquelle la côte, 



L'auteur de cet aperçu historiqu:, M. V. Pris l'a accompagné, 
dans le Bulletin de U société d'Histoire et d'archéologie de Gand 
où il a paru eo 1905 (livraison x) et dans une édition spéciale de 
notre monographie, de très nombreuses notes bibliographiques 
que nous avons cru pouvoir supprimer ici. 



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— l6 ^ 

grâce au comblement partiel des criques et 
l'émersion de la plaine maritime, semblait s'être 
définitivement assise, fut suivie, depuis l'an 
mil, d'une longue période désastreuse pour 
rotre littoral, et cette tourmente ne cessa 
qu'après 1570. 

Donc, de nouvelles tempêtes se déchaînèrent 
qui rompirent les dunes, tandis qu'un léger 
affaissement du sol permit aux flots de recon- 
quérir le terrain perdu pendant près d'un siècle 
et demi; et ces terribles inondations balayèrent 
sur le rivage les villages et leurs habitants qui 
s'étaient fiés au calme passager du flot perfide. 
Les vagues coupèrent cette fois le littoral de 
larges estuaires, les Jîima ?«(jm des documents; 
les marées remontèrent parfois les cours de 
l'Yser et de l'Aa jusqu'à une longue distance 
de leurs embouchures. 

Le danger constant des brusques inondations 
forcèrent les populations de la Flandre maritime 
à se fixer à distance des moeren qui s'étaient 
formés sur l'emplacement de l'ancien httoral. 
La côte semblait donc destinée à un abandon 
complet, d'autant plus que la plaine maritime 
était séparée du reste de la Flandre par la 
grande solitude boisée qui courait de Gand vers 
Thourout, bordée au nord par la grande bruyère 
flamande du Bulscampvelt et continuée jusqu'à 



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— 17 — 

la Colwide par le Vrijbusch; à l'est, la contrée 
fangeuse dite le pays de Waes était séparée 
des Quatre Métiers par un rideau de forêts. 

Par quel miracle pourtant ces marais {mariscœ) 
et ces landes (wastinœ) disparurent-ils dès le 
début du XII* siècle pour se transformer en 
gras pâturages, en riches campagnes dont la 
fertilité arrachera aux voyageurs étrangers des 
cris d'admiration? Quels furent ces hommes 
persévérants qui, non contents de fixer des 
bornes à la mer et à l'Escaut, firent des acquêts 
sur les flots et le'' fleuve pour créer de fécondes 
terres arables? 

Ce furent les grandes abbayes clunisiennes et 
cisterciennes, fondées non loin du littoral vers 
la fin du XI* et au commencement du XII' 
siècles, qui se chargèrent de cette vaste entre- 
prise. En 1084, le Clunisien saint Amould jeta 
les bases de l'abbaye de S'-Pierre à Oudenbourg 
derrière le bras oriental de la vieille Yperleet. 
Quelques vingt ans après, en 1107, une com- 
munauté de Cisterciens s'établirent au delà de 
l'Yser sur la lisière maritime, où ils érigèrent la 
célèbre abbaye de la Vierge dite des Dunes, 
lez-Coxyde. Celle-ci ne tarda pas à créer deux 
filiales : l'une. Ter Doest, ancien prieuré établi sur 
le territoire de Lisseweghe dès 1106, fut annexée 
en 1174; l'autre, Clermarais près Saint-Omer, fut 



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— i8 — 

créée par Fulco, abbé des Dunes en 1138. 

Les nombreux moines de ces abbayes entre- 
prirent de défricher les landes et de dessécher 
les marais afin de mettre ainsi en valeur les vastes 
territoires de notre côte flamande et des bords 
du Hont jusqu'au fond extrême de la Flandre 
Zélandaise. 

Aidés par de nombreux laies ou frères convers, 
imités bientôt par les associations ou wateringues 
des petits paysans libres de la côte, les moines 
élevèrent derrière les dunes, qu'ils avaient d'abord 
atterries au moyen de joncs, d'épines et de bru- 
yères, de longues digues {dyken ou barmen) et 
des escarpes {scelveringhen) ; les moeren furent 
drainés au moyen d'un système d'aqueducs 
{waterghanc) et d'égouts {goten ou ryolen), et trans- 
formés en polders {paludaria). De nombreuses 
terres neuves [novalen) s'étendirent bientôt le 
long de la côte de Dunkerque à Saeftinghe. De 
plus on rendit arables les bruyères {virgulta) et 
les wastines (woestijnen), grâce à un système 
très intelligent d'irrigation; des canaux (sckipleci), 
rendus d'ailleurs propres à la navigation par suite 
de la construction d'écluses [speyeii) et de plans 
inclinés [overârach] , partaient des fossés {zijde- 
linghen) en tous sens. Profès et convers fixèrent 
les alluvions {sdiorren, aer.u-eerpy voorland), com- 
blèrent les criques {krekeii, ghenîen). De la moer 



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— ig — 

desséchée {effossum niorum), on extrait la tourbe ; 
sur le rivage de la mer, on fabrique le sel. Dès 
la fin du XIP siècle, la lisière maritime, jadis 
aride ou bourbeuse, ne présentait plus qu'une 
suite ininterrompue de riches pâturages, où 
paissaient le gros et le menu bétail, et de gras 
polders, couverts de riches moissons. Partout 
s'élevèrent des fermes et des granges que diri- 
gèrent des frères convers, plus rarement des 
moines profès. 

Les Clunisiens d'Oudenbourg n'ont pris qu'une 
faible part à cette fertilisation de la lisière ma- 
ritime. Mais à part quelques parties colonisées 
par les abbayes de Bourbourg, de Cambron, de 
Notre-Dame de Courtrai, de Saint-Pierre de Gand, 
de Baudeloo, de Tronchiennes, on peut i£re que 
la conquête de notre côte actuelle jusqu'à l'ori- 
gine du Hont est l'œuvre des Cisterciens des 
Dunes et de sa filiale Ter Doest. 



Le point de départ de la fortune des Dunes 
git dans l'importante donation que Thierry 
d'Alsace fit au premier abbé, Fulco, en 1129, 
leur accordant autant de dunes qu'ils voudront 
en mettre en culture; les moines des Dunes usèrent 
largement de cette permission. Après avoir gagné 



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les rives de l'Yser par l'acquisition de terres 
neuves, l'abbaye obtint à Hemme les terres du 
prévôt de Bruges en 1139, et vers 1142 plus 
de cent mesures de terre (44 hectares) à Wul- 
pen, d'un certain Alnoth. Philippe d'Alsace, dès 
le début de son règne, favorisa les Dunes 
d'importantes concessions; tour à tour, il leur 
donna la terre de Waldach, la Synthe et Mar- 
dick et le Vormoer. 

L'énumération des biens des Dunes sous 
l'abbé Idesbald (1155-1167) montre l'importance 
des acquisitions de l'abbaye, cinquante ans 
après sa fondation. 

Aussi vers 1174, malgré le grand nombre de 
convers affiliés à l'abbaye, il fallut distribuer 
les terres neuves aux pauvres pour y attirer la 
population, l'abbaye ne pouvant plus suffire à 
leur exploitation. On sait d'ailleurs que Philippe 
d'Alsace s'associa à cette mise en culture de 
la côte, fit dessécher de grands territoires et 
éleva les digues du Zwin. Avec la fin du règne 
de ce prince, les donations aux Dunes ne font 
qu'augmenter, et, en conséquence, sans cesse 
le cercle d'activité des moines s'élargit : dès 
1183, dans le pays de Furnes seul, on possède 
1500 mesures de terre; en 1188 les possessions 
franchirent le Zwin et atteignirent Aardenburg. 
Huit ans après, grâce aux libéralités de Baudouin 



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■ — 21 — 

de Constantinople, on gagna le nord du métier 
d'Hulst : Ossenesse et Hontenesse sur le Hont, 
deviennent la propriété des Dunes. Jeanne de 
Constantinople ne voulut pas se montrer moins 
généreuse que Philippe d'Alsace ; bientôt les 
moines passèrent le Hont, qui était alors un 
mince cours d'eau, et s'établirent dans l'ile de 
Sud-Beveland. De grandes fermes furent élevées 
aux environs de Hulst, à Zande, Hengstdijk, 
Frankendijk, toutes près de Hontenesse. 

C'est particulièrement sous l'administration 
de Nicolas de Bailleul, le ii'abbé (1232-1253), 
que Jeanne prodigua ses faveurs aux Dunes. 

< Nicolas, » dit le chroniqueur Adrien de But 
(fi488), < fut prospère dans toutes ses entrepri- 
ses. Durant les vingt et une années qu'il 
gouverna les Dunes, supérieur à tous ses prédé- 
cesseurs, il administra, tel un second comte de 
Flandre, les affaires de son église avec une 
rare énergie; il construisit de très beaux et 
somptueux édifices, par exemple le portail du 
monastère, le dortoir des convers avec un 

< pollorium » et leur infirmerie. A Zande il fit 
édifier deux grandes granges, une chapelle et des 
maisons habitables ainsi qu'une porte ou aumô- 
nerie. De même, une grange à , Franckendijck, 
qui fut détruite par les Gantois durant les 
guerres de Flandre au milieu du XV" siècle. 



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D'autres granges furent construites dans nos 
fermes (curtes) de Hemme, des Allaertshuyzen 
{Alnothi domus), qui lut brûlée plus tard, de 
Boomgaerd et du Nêerhof des Dunes. » 

Si l'on compare la liste des possessions de 
l'abbaye en 1246 avec celle énumérée plus haut 
de 1167, on se fera une idée du chemin par- 
couru par les agriculteurs de l'ordre de Cîteaux 
en moins de quatre-vingts ans. Outre la grange 
de Synth e-lez-Mardick, on y trouve les fermes 
de Moer avec 420 mesures de terre et de 
Voormoer, les granges de Hemme-lez-Pervyse 
avec 780 mesures, celles des Allaertshuyzen 
près Wulpen avec 700 mesures, dans les 
Quatre-Métiers, celles de Zande, de Noorthof 
et de Frankendijk, près les terres de Hulst et 
de Moorshooft; dans le seul métier de Hulst, 
l'abbaye possédait 5000 mesures {2200 hectares) 
de terre endiguée et 2400 de terre non endiguée. 

Sous l'abbé Thierry (1256-1266), le construc- 
teur de la belle église des Dunes (13 octobre 
1262), on entoura de murs et de fossés les 
fermes et les granges; ce fut lui qui, avec la 
comtesse Marguerite, endigua 800 mesures de 
terre à Axele. Jean d'Oostburg (1288-1293) 
éleva l'hospice de l'abbaye et les nouvelles 
granges de la Synthe et de Franckendijk; mais 
en 1287, la mer ayant rompu les digues, il 



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— 23 — 

tâcha de recouvrer la terre de Zande sur les 
flots; seulement, pressé par la voracité des 
usuriers auxquels il avait emprunté de l'argent, 
il dut par trois fois disperser les moines de 
son couvent, dit Adrien de But. 

Les difficultés de Gui de Dampierre, d'ailleurs 
également pressé par ses créanciers, avec son 
suzerain Philippe le Bel, le forcèrent à vendre 
ou à donner aux Dunes de grandes propriétés 
dans le métier de Hulst ; en 1292, c'est 1133 
mesures, l'année suivante 408 mesures; 75 
bonniers en 1297, et 160 bonniers deux ans 
plus tard. C'est l'époque de l'épogée des ac- 
quisitions des Dunes. La confirmation de Gui 
de 1295 est éloquente à cet égard. 

Malheureusement, l'abbaye travaillait avec des 
capitaux d'emprunt. 

Deux grands maux affligeaient en effet le 
monastère : d'un côté, les inondations terribles, 
devenues très fréquentes depuis le milieu du 
XIII' siècle; en 1245, puis après 1265, enfin 
en 1287, l'irruption des flots vint détruire les 
acquêts péniblement gagnés sur l'élément liqui- 
de par la patience des convers. 

L'autre plaie fut l'usure : tombés entre les 
mains des Aldobrandini de Sienne, de Jean de 
Paris et des Crespin d'Arras, et de la Com- 
pagnie des Perruches, les abbés luttèrent pen- 



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~ 24 — 

dant quarante ans contre la ruine imminente 
de leur monastère. En 1310, les dettes de 
l'abbaye s'élevèrent à une somme immense. 
Pour sortir de cette impasse, les abbés décidè- 
rent de se débarrasser des convers, et d'allouer, 
moyennant un cens élevé, par un bail précaire, 
les terres des polders à des fermiers laïcs; les 
convers ne se laissèrent pas dépouiller sans 
résistance et nous verrons à Ter Doest le frère 
Guillaume de Saeftingbe, le héros de Courtrai, 
tuer à cette occasion le cellérier de l'abbaye. 

A partir du milieu du XIV' sièisle, grâce à 
cette exploitation nouvelle des terres, les finances 
se relevèrent et une nouvelle ère de construction 
commença. Gautier de Strijck (1354-1376) orga- 
nisa de vastes endiguements. Jean Thome 
(1376-1406) reconstruisit la grange de Zande et 
en répara et construisit d'autres; il fit le long 
du Hont des acquisitions fort importantes. Son 
successeur Thomas de Gorenbitere {1406-1418) 
continua les travaux d'endiguement, et acheta à 
Jean Sans Peur la sckorre de Saeftinghe, derrière 
le Polder de Jean de Namur (Naemenpolre) . 

Là s'arrête la grande expansion foncière des 
Dunes ; désormais les moines reçurent ou 
achetèrent des manoirs, des refuges et des 
fermes dans les villes et villages. D'ailleurs, 
les grandes inondations de la fin du XIV' et 



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— 25 -- 

du commencement du XV' siècles ruinèrent en 
grande partie les possessions des Dunes dans 
la Flandre Zélandaise. 

Et, à la même époque, les guerres flamandes 
du XIV et de la fin du XV= siècle détruisirent 
une foule de fermes et de granges de l'abbaye : 
celles de Zande, de Hengstdijk et de Lepe 
furent brûlées par les Gantois le i" juin 1348. 
Arnold Janszone rompit en 1384 avec ses com- 
pagnons la digue d'Oude-Ossenesse, et les 560 
mesures de terre englouties par l'inondation ne 
purent être reconquises qu'en 1468 par l'abbé 
Jean Crabbe. Entretemps la guerre des Gantois 
contre Philippe le Bon vint causer de nouveaux 
dégâts; celle contre Maximilien ruina complète- 
ment le pays maritime. 



L'histoire de l'abbaye de Ter Doest suit une 
marche parallèle à celle de son aînée. Moins 
importantes que celle des Dunes, ses posses- 
sions s'étendirent particulièrement sur les iles 
de la Zélande. La presque totalité des contours 
de Sud-Beveland lui échurent par héritage ou 
donation. Avant 1164, Ter Doest possédait déjà 
quatre cents mesures de terre dans cette île; 
en 1196, lui échurent des biens aux environs 



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— 26 — 

d'Aardenburg; l'année suivante, elle s'assura la 
propriété de tout le territoire de Lîsseweghe, 
où elle était établie. Plus tard ses fermes et 
granges s'élevèrent à Krabbendijk (Sud-Beve- 
land) en 1187, à Reimcrswalle dans les environs 
en 1214; le seigneur de Voome lui cède en 
récompense des endiguements, des terres à 
Middellant (Tholen), Bommenede (près Brou- 
wershaven), à Oosthoek; autour d'Aardenbourg, 
l'abbaye acquiert plus de cent mesures de terre 
et la grande grange de Groede-lez-Breskens ; 
puis le Patauspolder et des terres à Maldeghem, 
En 1231, Ter Doest ne possédait pas moins 
de deux grangia à Saeftinghe, tandis qu'elle 
obtenait neuf ans plus tard dans Sud-Bevelant, 
Kruininghen et ses 323 mesures près de Krab- 
bendijk et Monsterhoek. La même année 1240, 
on restitua à Ter Doest, la ferme d'AUebrands- 
weert et ses terres dans l'île de Putten, 
auxquelles s'ajoutèrent en 1262, Morlodenesse 
près de Krabbendijk, le polder de Frankendijck 
et des terres à Wulpen en face de Cadsant, 

Les deux confirmations des biens de Ter 
Doest en 1246 et 1276 nous permettent de 
juger de l'importance de ses accroissements 
successifs en moins de trente ans. 

Grâce à cet essor, vers 1244, on put con- 
struire cette splendide église de Thosan, plus 



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— 27 — 

remarquable sans doute que la belle église 
de Lisseweghe que nous admirons encore 
aujourd'hui, et quarante ans plus tard, l'abbé 
Guillaume de Hamme put achever les magnifiques 
bâtiments de l'abbaye. Dans la West-Flandre, 
s'élevèrent ces belles fermes que les Français 
détruiront en 1641 et 1650. 

Mais, maigre l'endiguement d'un nouveau 
moer en 1285, l'acquisition de Heiligenberg 
et de Gagheldonc lez-Hulst, la confirmation en 
l'année 1295 par Gui de Dampierre de 
quelques biens à Schoonendijke, Aardenbourg, 
Maldeghem, Uytkerke, Zuenkerke, Dudzeele, 
Ramscapelle, Coudekerke au quartier de Bruges, 
malgré tous ces accroissements, pour les mêmes 
raisons qu'aux Dunes, l'année 1300 marque 
pour Ter Doest le commencement de la déché- 
ance : l'abbaye ne devait pas moins de 7814 
livres à ces créancier? ; il fallut aliéner des 
terres, demander en 1310 à Robert de Béthune 
la permission de vendre 500 mesures de terre. 
Quatre ans après, la situation était tellement 
critique qu'au chapitre général de l'ordre de Cî- 
teaux, on s'en alarma et une enquête fut ordonnée. 
La dette du monastère se montait à gooo livres 
de forte monnaie ; il fallut vendre Heiligenberg, 
Aldebrantsweert, Oosthoek, Bommenede, les fer- 
mes de Monsterhoek, avec deux cents mesures 



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— 38 — 

de terres, les fermes de Crabbendîjk et de 
Oosthoek, avec trois cents mesures, et la 
petite cour de Nieuwerkerke. En 1329, la crise 
était à son comble et la faillite imminente. 

Ici aussi, on expulsa les convers pour vendre 
ou louer les terres moyennant un cens précaire 
aux petits paysans; on sait comment les frères 
laïcs se révoltèrent sous Guillaume de Saeftinghe 
en 1308. 

Nonobstant cette exploitation nouvelle, et con- 
trairement à l'évolution heureuse de l'abbaye 
des Dunes, la filiale de Ter Doest ne se releva 
guère des coups que lui portèrent les flots, les 
guerres de Flandre et les usuriers. Pourtant 
vers 1470, l'abbé Laurent de Vriendt fit con- 
struire les fermes de Cràbbendijk et de Monster- 
hoek ; vingt ans plus tard on rebâtit les fermes 
de Grauwe et en 1550 celle de Pilsbroecke, 
L'abbaye resta stationnaire depuis le commen- 
cement du XVI' siècle; ses bâtiments ne furent 
plus modifiés; lors de l'érection de l'évêché de 
Bruges, Thosan fut donné à Rémi Drutius, et 
c'est ainsi que P. Claissins en peignit le pano- 
rama en 1561. Malheureusement dès 1571, l'ab- 
baye fut détruite par les paysans réformés de 
■Westcapelle et de Ramscapelle. Tombée com- 
plètement en décadence vers 1594, elle fut 
cédée par l'évêché de Bruges aux Dunes en 



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— 39 — 

1624 et réunie à l'abbaye-mère. La ferme de 
Lisseweghe, où est conservée une des belles 
granges monumentales, appartient actuellement 
à l'évêché de Bruges. Elle lui fut abandonnée en 
1833 par le dernier religieux des Dunes, retiré 
alors dans le couvent à Bruges ; ce fut l'acte final 
d'une association religieuse qui avait duré plu- 
sieurs siècles. » 

Quant aux Dunes, leur fin fut aussi misérable 
que celle de Ter Doest. D'abord le lent enlise- 
ment de l'abbaye des Dunes sous les sables 
avait fait concevoir à Rémi Drutius, évêque 
de Bruges, l'idée de céder Ter Doest aux Dunes, 
car Thosan était trop endetté pour continuer 
l'exploitation de ses fermes. Les troubles de 
Flandre empêchèrent la réalisation de ce projet. 
L'abbaye, pillée une première fois par les ico- 
noclastes en 1566, fiit ruinée et saccagée par 
les Calvinistes en 1577. Pierre Fourbus nous a 
heureusement conservé dans un grand tableau, 
aujourd'hui à l'Hôtel de Gruthuuze à Bruges, 
l'exacte physionomie de ce vaste établissement 
religieux. La vue panoramique que le peintre 
nous a tracée, fait connaître la situation précise 
des bâtiments conventuels, leur destination, et, 
tout autour de l'enceinte, le coin de pays dunier 
où ils s'élevaient. 



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Pour comble de malheur les possessions de 
l'abbaye dans le pays de Hulst s'étaient abîmées 
sous les flots lors de la terrible inondation de 1570: 
Saeftinghe et Saint-Laurent disparurent à jamais. 

Bien que ruinés ou lamentablement malmenés, 
les bâtiments du vieux monastère furent encore 
habités par les moines. 

Mais le 7 septembre 1590, les rebelles osten- 
dais incendièrent les Allaertshuizen, la célèbre 
ferme d'Alnoth qui remontait à la seconde moi- 
tié du XII° siècle et qui comprenait six cents 
mesures de terre. Les religieux se retirèrent à 
Bruges, dans leur refuge du Houtbrekersdam. 
En 1593, une nouvelle bande détruisit la grange 
de Boomgaerde, et l'année suivante ce qui 
restait de la ferme des Allaertshuizen. Grâce 
au retour offensif du prince Albert d'Autriche, 
les moines purent revenir s'établir à Boomgaerde 
en 1601 ; mais, vingt ans plus tard, ils durent 
le quitter à nouveau, se fixèrent à Bruges et y 
élevèrent en 1628 un nouveau monastère, devenu 
aujourd'hui le séminaire épiscopal. C'est à cette 
époque, nous l'avons vu, que Ter Doest retour- 
na à l'abbaye-mère. 

Depuis, les Etats de Hollande accordèrent 
(1646) les biens des Dunes au métier de Hulst, 
au prince d'Orange, et le roi d'Espagne confirma 
cette donation au traité de Munster : encore à 



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— 31 — 

cette époque, le revenu annuel de ces posses- 
sions se montait à la somme de 80,000 florins. 
Les moines végétèrent dès lors dans leur cou- 
vent à Bruges; la communauté finît en 1833. 



Si nous avons cru devoir jeter ce bref regard 
sur l'histoire de Dunes et de Ter Doest, c'est 
pour mieux montrer leur expansion domaniale 
aussi énorme que rapide. D'après les donations 
énumérées plus haut, on peut évaluer au chiffre 
élevé de 24000 mesures de terre (10,560 hectares) 
les possessions des Dunes à l'époque de sa 
grande splendeur, vers la fin du XIII' siècle; 
quant aux domaines de Ter Doest, ils atteignent 
à peu près le tiers de ce nombre. 

Si l'on .tient compte du fait que, malgré 
l'inondation de 1570 qui noya Saeftinghe et 
Hontenesse, et les déprédations des paysans 
calvinistes à la même époque, les domaines 
des Dunes au seul métier de Hulst rapportaient 
encore en 1648 la somme énorme de 80.000 
livres, — on pourra se faire une idée du nombie 
et de l'importance des fermes {curies, villae) et 
des granges {grangia, scurrae) destinées à re- 
cueillir les innombrables charges de blé, d'avoine, 
de seigle, de gaude, de navets, de vesces et 



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— 32 — 

autres légumes. Remarquons que chaque fenne 
exploitait en moyenne 500 mesures de terre 
{220 hectares), et bien que le système de jachère 
triennale persista même dans les polders jusqu'au 
début du XV*^ siècle, le rapport de ces cultures 
énormes devait nécessiter la construction de 
granges immenses. Inutile de dire que la petite 
grange franque du paysan libre de la Flandre 
maritime ne pouvait convenir ici; il faut admettre 
plutôt que les Cisterciens rapportèrent de France 
le plan de ces vastes constructions, qui ont 
plus d'un rapport avec les granges que Clair- 
vaux et Cîteaux avaient élevées dans leurs 
domaines. N'oublions pas qu'outre les récoltes, 
elles devaient abriter les dîmes et les redevances 
en nature. 

Toutes celles de Flandre étaient tellement 
grandes qu'on -y pouvait célébrer la messe. 

Nous avons pu voir également que contraire- 
ment à la moyenne ordinaire de cinq à six 
granges que possédait chaque monastère cister- 
cien, les Dunes dépassaient notablement ce 
chiffre : on peut évaluer à une vingtaine le 
nombre de granges attachées aux fermes dont 
moines et convers avaient jalonné les rivages de 
la mer et les bords du Hont. 

V. Fris. 



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DESCRIPTION DES GRANGES ENCORE 
EXISTANTES. 



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^Illgous allons maintenant à la recherche 
«mXJi des restes de granges anciennes qui 
^i^^^ peuvent se trouver encore, soit sur nos 
terres de Flandre, au Fumes-Ambacht et dans 
les environs de Bruges, soit près de Dunker- 
que, soit enfin aux abords de l'Escaut occidental, 
dans la Flandre Zélandaîse. 

Et dans cette reconnaissance, supposé que le 
document historique prouvant l'origine cister- 
cienne des bâtiments fasse défaut, les dimensions 
inusitées et les formes particulières des granges 
conservées nous seront un guide des plus sûrs. 



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FERME DE BOGAERDE PRÈS DE COXYDE. 



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Ferme de Bogaerde, à Conyde. 



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On trouve sur le territoire de Coxyde l'im- 
mense ferme, aux constructions monumentales, 
qui porte le nom de Bogaerde. 

A quelque distance de la ferme, au coin d'un 
chemin qui franchit, sur un vieux ponceau, le 
Langhelis, cours d'eau naturel, et se perd ensuite 
dans les dunes vers la mer, voici une petite 



Chapelle de Saint Idesbalde à Co^cyde. 

chapelle blanche proche de quelques maisons de 
pêcheurs, que des taillis rabougris abritent des 
vents. 

C'est la chapelle dite d'Idesbalde; en face 
de cette minuscule construction se voyaient, 
il y a quelques années, des substructions de 
bâtisses en larges et grosses briques, qu'un 
chercheur patient avait retrouvées sous les sables; 



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— 40 — 

C'étaient les restes de la grande et puissante 
abbaye des Dunes, qui, comme on l'a vu plus 
haut, fut fondée au XII' siècle. 

Les moines de cette abbaye avaient acquis, à 
cette époque, la terre de Bogaerde, voisine de 
leur couvent, par une donation de Walter Cath. 

Dans cette ferme de Bogaerde, visitée par 
nous à diverses reprises et dont la situation, 
dans le voisinage des dunes, est vraiment 
pittoresque, nous voyons des bâtiments très 
anciens, du XIII' siècle, parmi lesquels, indé- 
pendamment de la grange dont les deux pignons 
opposés sont si curieux, il y a une autre 



Vue principale (lace sud). 

construction qui, elle aussi, date visiblement du 
XIII' siècle; nous en parlerons bientôt. 



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A et A Ancienne grange. 

B. Bâtimmt du XIIl' S - 

C. Logis du fermier. 

D. Verger. 

E. Niche à chien. 

F. Porcherie. 

G. Prairies. 
H.-I. Étables. 
J. Entrée. 



Plan de ia ferme de Bogaerde, à CoJiyde. 



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— 42 — 

Quelques bâtiments plus récents sont signifi- 
catifs et, comme la date de 1612 est marquée 
sur l'un d'eux, près d'une tourelle qui domine 
tout l'aggloméré agricole, nous y voyons la 
confirmation du fait qu'à cette époque, les moi- 
nes de l'abbaye ensevelie sous les dunes, étaient 
venus habiter leur ferme de Bogaerde, et en 
avaient renouvelé certaines parties. 

Il y a donc, dans cet enclos important, une 
grange monumentale. Le plan ci-dessus indique 
sa situation, à droite d'une vaste plaine centrale, 
011 un abreuvoir circulaire de grande dimension 



Détails de la corniche en briques moulurées de la grange. 
(Ferme de Bogaerde). 



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— 43 — 
est creusé. La grange, nous le remarquons par 
les croquis que voici, offre des motifs de déco- 
ration intéressants, notamment ces petites arca- 
des, en briques moulurées, qui formaient le 
cheneau ou la corniche des parois latérales ; 
une certaine partie en est conservée intacte. 

Les pignons principaux, où le plein cintre et 
l'ogive sont employés comme couronnement des 
baies, sont les seuls restes de la grange primitive. 

L'aire énorme qui les sépare est l'emplace- 
ment de ia grange du XlIP siècle : sur une 
■de ses faces, à l'Est, vers la grande cour dont 



Grange de Bogaerde (face nord). 

nous parlions, une grange de construction rela- 
tivement moderne est établie. 



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Elle n'a" que la moitié de la hauteur et de la 
largeur de celle qu'elle remplace. 




Ferme de B^aerde (revei 



de la Eace Nord). 



Un mur bas part de la grange, au fond de 
la vaste cour, et limite celle-ci vers la cam- 
pagne. Il aboutit aux bâtiments du XVII' siècle. 
Dans l'angle que fait ce mur, près de cette 
habitation du fermier, nous avons à signaler un 
bien intéressant détail de construction et qui, 
certes, paraîtra digne d'examen. 

C'est une niche à chien, dont les proportions, 
les lignes architecturales et les matériaux con- 
structils ne peuvent laisser de doute quant à 
l'âge. 

Nous avons là une petite curiosité d'insigne 
rareté. 



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— 45 — 

Les colossales briques, simples ou moulurées, 
qui furent utilisées dans la construction du 
mur d'enceinte et dans celle du logement du 
chien de garde (voir ces briques ondulées dans 
la couverture du mur), sont de l'espèce 



Niche à chien du Xllle siècle, dans la terme de Bogaerde. 

désignée sous le nom de « Moeffen ». Elles 
ont, du reste, la dimension de celles qui ser- 
virent à la construction de la grange même et 
à celle d'un autre bâtiment que nous avons à 
décrire à présent. 



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-46- 
Mais avant de quitter ce coin pittoresque qui 



L'autre câté de la niche à chien, dans la (erme de Bogaerde. 

date du XVII' siècle, signalons les curieuses 



dans la ferme 'àt Bogaerde. 



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— 47 — 

bases de colonnes romanes, en grès rose du 
nord de la France, ornant le seuil de la porte 
de la maison d'habitation. 

Celle-ci se termine par une sorte de chapelle 
à pans, formant un petit chœur. Puis, vers 
l'entrée de la ferme qui est défendue par 
une large porte cintrée et une autre plus petite, 
remarquons un vaste ensemble, de .belle propor- 
tion, ayant probablement formé l'habitation ou 



Ferme de Bogaerde. 
Infirmerie des Convers (XIU* siècle). 

l'infirmerie des ouvriers convers qui desservaient 
la vaste ferme, au moyen âge. 

L'arc plein-cintre et une belle ogive en 



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tiers-point sont les éléments architecturaux que 
nous rencontrons dans ce bâtiment important. 
Lui aussi, sans au- 
cun doute, remonte au 
XIII' siècle. 

Remarquons le joli 
motif des contreforts, et 
, la porte romane dessinée 
ci-dessous. 

Ajoutons, avant de 

terminer cette revue des 

curiosités architecturales 

de « Bogaerde >, qu'il 

CoDtrelorls à Boglrdl X ^' ^U picd du grand 

pignon Sud de la grange, 
et tout autour du bassin — 

ou abreuvoir, jonchant 
le sol, des restes de 
sculpture en pierre, 
dont nos croquis indi- 
quent la forme. 

Les pierres bleues, - 
moulurées, dont on va 7' 
voir le dessin, sont de 
grande dimension et ."■ 
constituent sans aucun ' 
doute des restes de =_ 
bâtiments importants .,_. ->,_^- - 



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disparus soit ici, dans la ferme de Bogaerde soit 
dans l'abbaye des Dunes elle-même, qui était 
à petite distance. 




Moulures en pierre dans la ferme de Bogaerde. 

Ce sont des témoins très caractéristiques de 
constructions dont la trace est perdue. 



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FERME D'ALLAERTSHUIZEN PRES 
DE WULPEN. 



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^■^Qne deuxième ferme, celle qui, dans les 
fij^K pièces authentiques très anciennes, porte 
n)SIb« le nom de : < Alnothi domus » , a con- 
servé un pignon monumental. 

C'est celui de la vieille grange des * Allaerts- 
huizen >. 

Nous la trouvons dans le voisinage des dunes, 
aux environs de Wulpen, entre Fumes et 
Nieuport. 

Ce reste important d'architecture cistercienne 
du XIII* siècle mérite notre examen attentif. 

Nous comptons au nombre de nos excursions 
les plus curieuses en ce pays de vastes landes, 
celle que nous fîmes à cette ferme pour voir 
son pignon extrêmement imposant, quoique ruiné. 

Depuis des années ce pan de mur cyclopéen, 
véritablement grandiose, entrevu au fond des 
campagnes en allant en chemin de fer de Dix- 
miide à Fumes, nous intriguait. Un jour, il 
nous fiit presque possible d'y atteindre. 

Nous avions voulu aborder cette vaste exploi- 



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— 54 — 

tation agricole, en venant de Nieuport. Mais 
nous nous perdîmes dans un enchevêtre- 
ment de prairies et de fossés, — et nous 
dûmes renoncer à arriver au terme de notre 
promenade. Le bloc de maçonnerie qui cachait 
un grand triangle de l'horizon ne nous mon- 
trait pas alors sa façade principale; il se 
profilait en revers. 

Nous vîmes, à distance, un groupe de 
bâtiments au fond duquel le pignon énorme se 
découpait entre les arbres. 

C'est l'an dernier, en 1904, ayant mieux 
dirigé notre excursion, et en partant cette 'fois 
de Wulpen, que nous pûmes enfin arriver au 
pied de ce pignon imposant. 

A des lieues sa masse se découpe sur le ciel, 
et les arbres voisins, émergeant du groupe des 
bâtiments de la ferme, leur forment une ceinture 
noire très impressionnante. 

Nous avons traversé les terres plates aux 
pâturages infinis, qui sont la beauté de cette 
région du Fumes- Ambacht. 

La ferme est exactement au centre du grand 
triangle de pays qui a pour coins Nieuport, 
Fumes et Dixmude. 

Après avoir passé par Wulpen, village qui a 
conservé une intéressante église dont des parties 
ruinées n'ont pas été rebâties, et traversé le 



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Le grand pigoon de U grange d'Allaertshuùen. 



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cimetière de cette commune, on se trouve à 
une grande distance encore de la ferme que 
son immense façade signale à l'horizon. 



Grange d'Allaertshuizen (face arrière du grand pignon). 

Par le sentier qui, au delà d'un petit pont, 
devant l'étendue énorme de prairies qu'il faut 
franchir, tantôt longe un pré, tantôt passe sur 



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— 57 — 

un ponceau de bois, tantôt file en ligne droite 
au travers d'une vaste prairie couverte de 
bétail, on arrive enfin à ce pignon gigantesque. 

Découpé, déchiqueté, il fait face aux landes 
plates que nous avons parcourues. Au temps 
jadis, il en devait conserver les riches et 
merveilleuses moissons. 

Autour de lui, maintenant bien dégénérées, 
sont la ferme et ses granges de taille ordinaire. 

On ne voit tout d'abord que le vaste 
triangle de briques patiné par le temps et le 
soleil : en approchant, on détaille les beaux 
contreforts qui montent au sommet de ses 
versants, ses fenêtres romanes et le bel ap- 
pareil, en immenses « Moeften », dont il fut 
construit. 

Tous les éléments sont de plein cintre : les 
ouvertures étroites, encadrées d'une sorte de 
fenêtre aveugle, et l'arc, dont on aperçoit une 
trace entourant la grande baie qui était la 
porte charretière vers la campagne. C'est la 
même disposition qu'à Ter Doest et à Bogaerde; 
cette large porte était placée à l'extrême droite 
de l'un des pignons. 

Nous répétons qu'ici, à Allaertshuizen, le pig- 
non de la façade Sud est seul resté debout, soute- 
par de puissants contreforts; le pignon opposé, 
les murs latéraux, le toit gigantesque ont disparu. 



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-58- 

Nous avons dit combien sont mesquines les 
annexes que cache actuellement le vieux mur 
coloré. Les autres constructions, au fond et 



Contrercrls de la grange d'Allacrtshuizcn. 

autour d'une très grande cour, avec des pigeon- 
niers pittoresques, sont du XVII'^ siècle tout au 
plus. L'ensemble forme un enclos étendu, qui, 



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. — 59 — 

avec son encadrement d'arbres que le vent de 
mer tord et dénude, a grande allure. 

L'histoire, ou du moins les documents relatifs 
à cette ferme d'Allaertshuizen se réduisent à 
quelques citations éparses dans les chroniques 
parcourues par nous et que M' V. Fris a 
relevées dans la notice qui précède la présente 
étude. 

Aux AUaertshuizen nous n'avons rencontré, 
■en dehors du pignon gigantesque, aucun détail 
qui parût être de haute antiquité. 

Son attirance est grande, et les croquis que 
nous en avons faits donneront, nous l'espérons, 
une idée suffisante des dimensions extraordi- 
naires et de la beauté de ce reste vénérable. 



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FERME DE HEMME, PRES DE PERVYSE. 



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"Il- 



5ÎÎ^-' 



V 



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^oici la troisième ferme importante ayant 
mi appartenu à l'abbaye des Dunes et dont 
3 les restes peuvent avoir de l'intérêt pour 
nous. C'est celle de Hemme située près de 
Pervyse (environs de Dixmude). 

Sur toute cette immense surface des landes 
qui s'étendent, plates et coupées de . fossés 
serpentants, entre Fumes, Dixmude et Nieuport, 
on voit, à distances à peu près égales, des 
fermes énormes, aux grands toits de chaume 
ou de tuiles, aux murs éclatants de blancheur. 

Celle de Hemme est encore l'une des plus 
importantes. Isolée dans un coude de l'Yser 
canalisé, le beau fleuve aux eaux claires qui 
coule vers Nieuport et la mer, elle est à une 
lieue de Pervyse, et près d'un pittoresque hameau 
qui porte le nom de Schorbraecke, 

Les , constructions qui fonnent la ferme de 
Hemme se présentent à nous, comme aspect 
et distribution, probablement de la même façon 
que les bâtiments anciens qu'elles remplacent. 



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- 64- 

Ceux-ci ont, par la suite des temps, dû être 
ruinés ou incendiés. En tous cas, il n'y a plus, 
au Groote Hemmf, de grange de dimension 
considérable, comme devait l'être celle qui, au 
XIII" siècle, y fut bâtie par le grand construc- 
teur de granges, Nicolas de Bailleul, abbé 
des Dunes. 

Nous croyons que celle de Hemme pouvait 
avoir l'importance, l'aspect et les dimensions 
de celles de Bogaerde près de Coxyde, et 
des Allaertshuizen, qui furent construites en 
même temps, par le même abbé. 

Les granges que nous trouvons ici au nombre 
de trois, sont de proportions plutôt modestes. 
Nous avons fait un croquis de l'ensemble de 
cette ferme intéressante, avec son corps de 
logis à clocheton, ses étables et ses annexes 
nombreuses. 

Cette ferme voisine avec une autre qui s'appelle 
Kleine Hemme. Cette dernière est plus près de 
Saint-Georges, le village à pittoresque église, 
qui est relativement proche de Nieuport. 

Au Groote Hemme, une large muraille blanche, 
percée d'une porte charretière et d'une autre 
pour piétons, est ornée, si je puis ainsi dire, 
d'un écriteau assez rébarbatif que j'ai transcrit, 
et l'on conviendra que ces mots ; Alwie zich 
verstottt in dezen wal te komen visscken, stelt zick 



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-65- 

hlool aan kriiid en lood, sont peu engageants et 
de nature à faire réfléchir les braconniers d'eau 
■douce; les inoffensifs pêcheurs sont éloignés 
d'une iaçon assez brutale de ces fossés d'enceinte. 

Mais nous avons dépassé le mur ou plutôt le 
porche, et nous voici sur une sorte de vaste 
terrain surélevé. 

Les terres, provenant du creusement du 
séculaire fossé, ont formé cet immense tertre. 

Les bâtiments, dont notre croquis mar- 
que la disposition, furent élevés au XVIP 
siècle apparemment, et nous avons pensé que 
leur silhouette pouvait trouver place dans ces 
pages. 

Notre désillusion de ne plus trouver ici les 
constructions très anciennes que nous cherchions, 
fut compensé par la promenade intéressante 
que nous fîmes pour atteindre Hemme et puis, 
l'ayant quitté, pour rencontrer l'Yser aux belles 
eaux. Près de la gare de Pervyse, on voit 
encore les silhouettes intéressantes d'autres 
fermes. 

Modestes relativement, et constnùtes au XVIII' 
siècle, elles profilent sur la rase campagne de la 
région, vers Nieuport, leurs pignons blancs et 
leurs longues toitures couvertes de chaume. 



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FERME DE L'ABBAYE DE TER DOEST 
LISSEWEGHE. 



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Dçiiiizedoï Google 



ù)ous avons vu jusqu'ici des restes archj- 
j tecturaux intéressants à Coxyde, à Allaer- 
' huizen près Wulpen, et à Hemme, fermes 
ayant toutes appartenu à des dépendances de 
l'abbaye des Dunes. 

Examinons maintenant les traces de vieilles 
constructions que nous pourrons trouver en 
divers endroits et qui ont fait partie de fermes 
dépendant directement de l'abbaye de Ter Doest, 



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— 70 — 

qui, nous l'avons dit, filiale de celle des Dunes, 
était établie à l'autre extrémité de notre côte 
de Flandre, près de Lisseweghe, 

C'est aux approches de la grande et splendide 
tour de ce village de Lisseweghe, à l'ombre 
de la colossale église qu'elle domine, que nous 
visiterons maintenant la ferme de Ter Doest. • 
. Elle est située à un quart de lieue de Lisse- 
weghe en venant de Dudzeele, donc de la 
direction de Bruges. Les constructions que nous 
offre cette ferme sont les restes de l'antique 
abbaye de Ter Doest ou de tous les saints, 
« Thosan, » comme le disent les vénérables 
chartes. 

Le site est mélancolique ; de grands arbres 
font un couvert sombre aux bâtiments éparpil- 
lés, et cachent en partie la belle grange du 
XIIP siècle, dont la masse imposante se prolonge 
et se profile superbement entre les vieux troncs 
tordus. 

Près du large canal qui relie Bruges à la 
mer, vers Zeebrugge, et à hauteur de Lisseweghe 
à peu près, un chemin quitte la route qui longe 
ce nouveau canal et passe devant une petite 
chapelle du XVII' siècle ; un coude brusque, et 
.les constructions anciennes se présentent, domi- 
■ nées par les pignons pointus qui font l'étonnement 
du regard. 



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La grange que nous trouvons ici est la seule 
de toutes celles que nous avons examinées dont 
les dimensions, les détails, la construction 
toute entière soient restés intacts. Ayant pénétré 
par un porche du XVII' siècle dans la vaste 
cour plate et nue de la ferme, nous en voyons 
le pignon le moins intéressant; il est caché sur 
toute sa largeur par des constructions basses qui 
sont des porcheries, etc. 



Grange de Ter Doest. 

Longeons le mijr latéral, avec ses contreforts 
«t ses fenêtres romanes; une porte charretière, 
qui paraît renouvelée, se trouve au milieu de 



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cette longue façade. Contournons la grange et 
voici le grand pignon, faisant face à Dudzeete, 
dont le croquis précédent montre la . belle 
ampleur, le noble caractère. 

Ici nous trouvons, sauf à la porte d'entrée 
qui a un arc plein cintre, les formes ogivales 
primaires. Ces grandes et hautes baies aveugles, 
à double lancette que couronne un œil de bœuf» 



Intérieur de la firange de Ter Do«Et 



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donnent à la construction un aspect de vaste 
église sans tour ni transept. 

L'intérieur est remarquable par ses dimensions 
inusitées, îa complication de ses charpentes- 
colossales, s'élevant sur des piliers en chêne 
brut placés sur des blocs de pierre. Tout cela, 
dans la demi -obscurité du lieu, fait impression. 
Un curieux détail : dans les murs latéraux on 
trouve de ces petites baies aveugles, à pierres 
de couverture inclinées, motif que nous rencon- 
trons à Gand, dans les tours de l'église Saint- 
Jacques notamment. 



Petites baies aveugles de la grange de Ter Doest, 



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C'est ici le moment où il faut domier quelques 
renseignements sur les dimensions extraordinaires 
de nos granges et particulièrement sur celle 
dont nous nous occupons. La grange de Ter 
Doest a, selon Jean d'Ardenne (p. 348-350 de 
la Côte de Flandre), une longueur de SS^So, 
22^75 (Je largeur et 30'"75 de hauteur à la 
pointe du pignon, ce qui est plus de la moitié 
de la hauteur de la tour du Beffroi de Gand, 
bien entendu du massif en pierre de celui-ci. 

Dans son travail sur Bruges et les environs, 
James Weale dit que cette grange de Ter Doest 
serait de ia8o. 

Celles que nous avons examinées avant elle 
sont plus anciennes encore, car nous avons vu, 
plus haut, dans des pièces d'archives, que l'abbé 
Nicolas de Bailieul, XP abbé des Dunes, aurait 
lait construire la grange de Pomerio, ou Bo- 
gaerde, celle de Alnoti, ou Allaertshuizen, entre 
1232 et 1253. Datant amsi, avec celle de Hemme 
disparue et celle qui était dans la basse-cour 
de l'abbaye même des Dunes (voir le tableau 
qu'en a peint Fourbus), de la première moitié 
du XIII' siècle, on s'explique que les formes 
romanes dominent dans leur construction. 

Notre grange de Ter Doest, plus jeune d'un 
bon quart de siècle, accuse des formes plus 
nettement ogivales, remarquables surtout aux 



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grands pignons; seules, la grande porte d'entrée 
et les petites fenêtres latérales ont un arc roman. 

Une description détaillée de cette construction 
grandiose est donnée par Van Hollebeke (voir 
l'ouvrage cité dans la préface), avec des vues 
<t des détails se rapportant à celle-ci, ou à 
des restes épars d'architecture disséminés, à 
son époque, dans les coins de la ferme. 

Le temps a, du reste, accompli son œuvre 
depuis le demi-siècle qui vieillit l'œuvre de cet 
auteur; ces restes ont disparu, cachés ou couverts 
de végétations. 

Dans les bâtiments de la ferme, qui, elle 
aussi, comme à Bogaerde, a une tourelle 
«'élevant sur l'entrée de l'habitation du fermier, 
il y a une ancienne cheminée très curieuse ; elle 
■est formée de deux pieds droits à têtes d'homme 
et de femme, du XV' siècle au moins. Les 
■murs de la salle commune à laquelle cette 
■cheminée appartient a des carrelages bleus et 
d'autres teintes, émaillés, et formant motif 
d'encadrement symétrique à une petite chapelle 
murale. 

Nous quitterons cette ferme solitaire, où 
règne un calme absolu, et dont la vaste et 
impressionnante grange est la seule intacte, 
répétons-le, de celles que nous étudions, pour 
regagner soit Dudzeele, soit Lisseweghe. Dans 



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-76- 

le village de Dudzeele, un beau reste d'archi- 
tecture romane a été conservé devant l'église 
nouvelle. 

C'est l'ancienne tour de la primitive église 
— un bloc trapu et de construction assez 
barbare, en pierres des champs, dites Veldsteemn. 
Il est de silhouette intéressante, et quelques 
détails en sont dignes d'examen. Nous pouvqn& 
aussi quitter Ter Doest en nous dirigeant vers 
Lisseweghe tout voisin. 

Là se dresse cette merveilleuse église du 
XIII'' siècle en briques, dont nous pariions en 
commençant ce chapitre. Elle est d'imposante 
silhouette avec sa belle grosse tour, connue de- 
tous ceux qui, de Bruges allant à Blankenberghe, 
jettent un coup d'œil sur la campagne à droite. 

Ce coin de pays est donc d'un intérêt 
archéologique incontestable ; on peut joindre à 
ces trois curieuses impressions d'art, Ter Doest, 
Lisseweghe et Dudzeele, celles, non moins- 
profondes, que fait éprouver la visite de la 
ville morte de Damme, toute voisine, et des 
monuments qui témoignent de son ancienne 
importance . 



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CONCLUSION. 



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SfiSrcjour terminer, il nous resterait à parler 
a ^g S de l'existence probable de restes d'autres 
«BiaSB granges de nos abbayes, et notamment 
de celles qui furent construites par des abbés 
des Dunes, à un endroit appelé actuellement 
Grande et Petite Synthe entre Mardyck et Dun- 
kerque; ce Synthe fiit, à travers les siècles, 
Sentines, Senthenis, Quinit, Zinitz, Sînten et 
Zwynthe. 

Nous avons appris, par une lettre de renseig- 
nements du secrétaire de la Société dunkerquoise, 
que plus rien n'existe à Synthe en fait de 
vestiges de bâtiments anciens. 

Il n'y a plus rien non plus, ou du moins fort 
peu de chose à Zande, au nord de Hulst, 
d'après une lettre de M' Collet d'Escury qui 
habite dans cette contrée de la Flandre 
Zélandaise. 



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En finissant cette étude, il convient de dire, 
pour nous résumer, que les gigantesques débris 
de constructions étudiés par nous à Coxyde, à 
Wulpen et à Lisseweghe, et formant une trilogie 
de monuments de rare et noble aspect, sont 
suffisamment curieux en eux-mêmes pour nous 
permettre de nous rendre compte de l'étonnante 
entreprise agricole dont nos abbayes étaient lé 
centre. Les quelques excursions que les touristes 
peuvent faire, grâce aux renseignements que ce 
petit ouvrage contient, sont de celles qui 
intéresseront, sans aucun doute, les visiteurs de 
la Côte de Flandre. 

Elles permettent à ceux-ci de se rendre d'une 
part soit à Fumes, Nieuport ou Dixmude vers 
les fermes de Coxyde et des AUaertshuizen ; 
. -de l'autre côté, vers le Nord de la Flandre 
maritime, ils verraient en même temps que cette 
-grange monumentale de Ter Doest, le beau 
■canal qui l'avoisine, le magnifique ensemble de 
l'église et de la tour de Lisseweghe, et, aux 
approches de Bruges, la ruine romantique de 
Dudzçele, avec la ville de Damme, tant déchue, 
aux si mélancoliques aspects. 

Les promenades à ces divers souvenirs archéo- 
logiques du XIII' siècle sont vraiment attrayantes 
«t nous souhaitons que cet opuscule les &sse 



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mieux connaître des nombreux admirateurs de 
notre paysage dunîer. 

Nous avons voulu en même temps, en étudiant 
cette organisation agricole si puissante et d'un 
ordre si spécial, apporter une contribution à l'his- 
toire des habitations et des exploitations rurales 
de notre pays. 

A. Heins. 



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TABLE DES MATIERES. 



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TABLE DES MATIERES. 

Page 

Introduction 7 

Aperçu historique 15 

Description des granges encore existantes : 

Ferme de Bogaerde, près de Coxyde 3g 

Ferme d'AllaertshuizeD, près de Wulpen 53 

Ferme de Hemme, près de Pecvyse 63 

Ferme de l'abbaye de Ter Doest, à Lisseweghc 69 

Conclusion 79 



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I 



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